[musique]
Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast de l'OIT,
sur l'avenir du travail.
Heureux de vous retrouver toutes et tous afin
d'aborder sans concession les questions fondamentales
liées au monde du travail et les profondes transformations
qui s'opèrent au quotidien.
[musique]
Je m'appelle Guebray Berhane.
Je travaille au sein de l'Organisation
internationale du Travail à Genève.
Aujourd'hui, nous allons traiter d'un sujet majeur et épineux.
Je veux parler de la prévention de la violence
et du harcèlement dans le monde du travail.
En effet, ce 25 novembre, nous célébrons la Journée internationale pour
l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
Cette journée marque également le début des 16 jours
d'activisme contre la violence basée sur le genre.
Or, ces deux dernières années, l'ONU femmes,
l'Organisation internationale du Travail,
l'OIT, et bien d'autres institutions et ONG,
organisations non gouvernementales,
nous ont alertés face à la recrudescence
de la violence et du harcèlement envers les femmes.
D'une part, en raison de la pandémie du Covid et d'autre part
à cause des multiples crises qui frappent nos pays.
Que faire pour mettre fin à cette violence?
Comment soutenir un activisme robuste pour prévenir cette violence?
Des questions clés que je vais m'empresser de poser à notre invitée.
Fatim Christiane N'diaye,
vous êtes la spécialiste technique principale Genre, Égalité,
Diversité et Inclusion pour l'Afrique francophone
auprès de l'Organisation internationale du Travail.
Juriste de formation,
vous avez coordonné de nombreux projets sous-régionaux de lutte
contre la pauvreté et pour l'égalité entre les femmes et les hommes.
Merci de prendre part à ce podcast.
Avant même de parler de comment mettre fin à cette violence,
Fatim Christiane, je suis tenté de vous demander:
qu'est-ce qu'on entend par violences faites aux femmes?
Bonsoir, Guebray.
Je pense que les violences faites aux femmes sont les comportements
qui sont inacceptables et qui causent des dommages aux femmes,
surtout quand ces comportements sont basés
sur le fait que la victime est de sexe féminin.
Je pourrais peut-être aussi ajouter que ces comportements
ont des conséquences néfastes, non seulement sur la santé,
mais aussi sur la psychologie et parfois
sur les revenus des personnes qu'ils affectent.
Merci beaucoup. Merci d'avoir dressé le cadre.
Juste en suivant cette réflexion,
pourquoi devons-nous mettre fin à la violence
contre les femmes et les filles?
Je pense que mettre fin à la violence envers les femmes et les filles,
c'est une question de dignité humaine.
Au XXIe siècle, nous ne pouvons pas nous permettre
d'avoir tout un pan de la population,
qui soit des victimes de la violence et du harcèlement.
C'est une question de droits de l'homme,
mais c'est aussi une question économique.
Lorsque nous analysons les conséquences de la violence
et du harcèlement envers les femmes et les filles,
notamment dans le monde du travail, nous nous rendons compte
à quel point cela est d'un coût pour nos entreprises,
mais aussi pour les États et les sociétés toutes entières.
La Convention n° 190 de l'OIT est
le premier traité international à reconnaître
le droit de chacun à un monde du travail
exempt de violence et de harcèlement,
y compris de violence et de harcèlement fondés sur le genre.
Vous savez que 22 États Membres ont déjà
ratifié cette Convention n° 190 de l'OIT.
Est-ce que vous pensez que c'est un outil que nous pourrions
utiliser pour combattre la violence et le harcèlement?
Pour moi, c'est un outil fondamental
de lutte contre la violence et le harcèlement,
parce que cette convention est inclusive, elle est participative,
elle permet aux États, elle permet aussi aux partenaires sociaux,
c'est-à-dire les organisations d'employeurs et de travailleurs,
de créer un environnement exempt de violence et de harcèlement.
Peut-être que je pourrais aussi aller dans
le cadre de la promotion de cette convention,
mais aussi dans le cas de l'activisme
qui nous est demandé pour cette année.
Le rôle, peut-être, des médias ou des journalistes,
peut jouer en faveur de la ratification de cette Convention
n° 190 de l'OIT sur la violence et le harcèlement.
Qu'est-ce que vous en pensez?
Dans nos pays, notamment en Afrique,
la majorité des travailleurs et des travailleuses
se retrouvent dans l'économie
informelle et nous avons un nombre croissant
de personnes qui sont analphabètes.
Les journalistes peuvent jouer un énorme rôle de sensibilisation.
Par exemple, nous avons, au Sénégal,
créé un réseau de journalistes engagés dans la lutte
contre la violence et le harcèlement au travail.
Ces journalistes diffusent en langue nationale
des informations sur la Convention et la recommandation.
Ils sensibilisent les populations,
notamment les populations les plus fragiles à
non seulement mettre fin
mais aussi dénoncer les actes de violence et de harcèlement,
parce que la dénonciation est un point qui est très sensible
et qui est très difficile pour de multiples raisons,
tant sociales qu'économiques.
Ils sensibilisent aussi nos gouvernements,
parce que nous avons de nombreux articles
qui interpellent les entreprises, qui interpellent les gouvernements,
qui interpellent aussi les organisations syndicales pour, qu'ensemble,
nous puissions mettre fin à ce fléau.
Ce que je voulais dire,
c'est que nous avons une coalition qui est très belle,
c'est la coalition entre les journalistes,
les syndicalistes et le gouvernement pour justement mettre fin
à la violence et au harcèlement et ratifier la Convention n° 190.
Merci. Vous venez de mentionner, notamment,
le Continent et un exemple concret de ce réseau de journalistes.
Est-ce que je pourrais demander: quelles sont les autres actions
concrètes qui sont menées sur le terrain et les bonnes pratiques,
notamment au Sénégal ou en Afrique de l'Ouest,
voire en Afrique, par rapport à cela?
Les actions, les activités, sont multiples, mais je peux citer que,
tout d'abord, on a travaillé sur la recherche.
C'est très difficile de faire des plaidoyers
sans avoir des faits concrets, sans avoir de chiffres,
sans avoir d'informations sûres et fiables,
donc on investit beaucoup cet axe de la recherche.
L'autre axe, comme je l'ai dit tout à l'heure,
c'est tout l'axe de sensibilisation
des travailleurs et des travailleuses, notamment les plus vulnérables,
ceux de l'économie informelle et rurale, mais aussi,
on travaille avec les entreprises pour mettre en place des mécanismes
de lutte contre la violence et le harcèlement
au sein de leur établissement.
Avec les entreprises, nous travaillons, aussi et surtout,
avec les responsables des ressources humaines,
les comités de santé et sécurité au travail,
pour qu'ils puissent vraiment travailler à mettre en place des lieux
sains et sécures pour tous les hommes et toutes les femmes.
Fatim Christiane N'diaye,
merci pour ces explications et ces pistes de réflexion
sur la prévention de la violence et du harcèlement au travail.
Oui, la violence à l'égard des femmes continue d'être
un obstacle à la réalisation de l'égalité, au développement, à la paix,
mais des solutions concrètes existent.
Merci à vous de les avoir partagées avec nous.
Merci également aux auditeurs et auditrices qui nous ont
rejoints pour cette édition des Voix au travail.
Ce podcast sera bien évidemment disponible en ligne.
Si vous souhaitez obtenir plus d'informations
sur la prévention de la violence et du harcèlement au travail,
sur la Convention n° 190 de l'OIT
sur la violence et le harcèlement au travail,
vous pouvez consulter notre site web,
à l'adresse: voices.ilo.org.
J'espère bien vous retrouver très vite lors du prochain épisode
du podcast de l'OIT sur l'avenir du travail.
Merci beaucoup.
[musique]