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Points de vue sur le monde du travail
Photo: ILO/OIT Abdul Halik Azeez
Développement économique local

La guerre au Sri Lanka a tout emporté, mais j'ai pris un nouveau départ

Ma famille était pauvre et brisée après la guerre civile au Sri Lanka, mais je ne pouvais rien y faire. Alors quand j'ai eu l'occasion d'améliorer nos vies, je n'ai pas hésité.

J'ai grandi dans la pauvreté. Quand j'étais bébé, nous vivions à Colombo. Mon père faisait vivre la famille grâce à un travail journalier. Il est mort subitement dans un accident. Je n'avais qu'un an à l'époque.

Notre mère nous a élevés avec difficulté. Elle devait s'occuper de cinq enfants, quatre filles et un fils. Je me suis mariée à l'âge de quinze ans. Après mon mariage, nous vivions toujours dans la pauvreté, mais notre vie s'est peu à peu améliorée; nous avons acheté un terrain à Kepapilavu Mullaitivu, dans la province du Nord du Sri Lanka, et construit une maison.

C'est à cette époque que la guerre a commencé. Nous avons été contraints de déménager en 2009. Nous sommes passés d'un endroit à l'autre, et à Mullivaikkal, nous avons été relogés dans une zone contrôlée par l'armée. Ils nous ont emmenés dans le camp de réfugiés de Cheddikulam. La vie dans le camp de réfugiés était difficile car il y avait une pénurie de nourriture et d'eau. Nous avons beaucoup galéré avec les enfants pendant près de sept à huit ans.

Après plusieurs années difficiles, en 2016, nos terres ont finalement été libérées pour la réinstallation.

On nous a donné nos terres, mais je n'avais pas d'économies pour en faire quoi que ce soit, car nous avions tout perdu pendant la guerre – j'avais perdu ma maison, et mon mari n'était plus avec nous. Je n'avais pas d'argent pour envoyer mes cinq enfants à l'école.

Je n'étais pas en mesure de fournir à ma famille les produits de première nécessité.

Veronica Rosani Susilkumar Cultivatrice d'arachides

Quatre de mes filles se sont mariées quand elles étaient jeunes. L'une d'entre elles a été blessée par un obus pendant la guerre. Elle est alors tombée en dépression et est encore aujourd'hui affectée par les sons forts. Elle a trouvé un emploi dans une usine de vêtements, mais elle ne pouvait pas supporter le bruit des machines. Elle n'a pas pu continuer à y travailler.

La seule possibilité qui s'offrait à moi était le travail salarié journalier. En tant que femme et chef de famille sans soutien extérieur, je n'étais pas en mesure de fournir à ma famille les produits de première nécessité.

Veronica et sa famille se tiennent devant un arbre et prennent la pose pour une photo.

Notre famille a vécu dans la pauvreté même après notre réinstallation.

© ILO/OIT Abdul Halik Azeez

Ensuite, nous avons eu de la chance. Une société coopérative et un projet de l'Organisation internationale du Travail (OIT) ont pris connaissance de notre situation et m'ont invité à participer à un programme de subsistance sur la culture des arachides.

Ils ont dit que si je participais au programme, ils me donneraient des graines d'arachides que je pourrais utiliser pour commencer la culture sur une demi-acre de terrain. Ils ont dit qu'ils me donneraient 20 kg de graines d'arachides pour la culture et qu'après la récolte, je devrais leur rendre la même quantité. J'étais heureuse de le faire.

Dans le cadre du projet, ils nous ont également appris à cultiver la terre et à faire pousser des cultures. J'ai mis en pratique ce que j'ai appris.

Au début, j'ai dû emprunter de l'argent, même pour le fil de fer nécessaire à la construction d'une clôture sur mon terrain. Malgré toutes ces dettes, j'ai réussi à cultiver 20 kg de graines d'arachides et j'en ai récolté les fruits.

Aujourd'hui, j'ai acheté du fil de fer avec mon argent, je suis propriétaire de la clôture et j'ai étendu le terrain à une acre. J'ai pu rendre les 20 kg d'arachides qu'ils m'avaient prêtés. Après cela, ils m'ont même construit un puits agricole.

Ce nouveau puits m'a permis de cultiver des arachides toute l'année. Nous nous sommes développés petit à petit.

Gros plan sur la main de Veronica, qui tient des arachides.

La culture des arachides a changé ma vie.

© ILO/OIT Abdul Halik Azeez

Lorsque la guerre a éclaté, nous avons déménagé dans les camps sans même avoir de vêtements corrects à porter. Après le conflit, nous sommes restés bloqués à la maison, sans revenus.

Alors, quand on nous a montré un moyen d'améliorer notre situation, nous avons saisi l'occasion. Je suis convaincue qu'en faisant des efforts, nous progresserons.

C'est notre propre entreprise, nous y mettons tout notre cœur et toute notre énergie.

Veronica Rosani Susilkumar Cultivatrice d'arachides

Cultiver n'est pas facile, c'est un travail pénible que l'on fait sous un soleil de plomb. Mais c'est notre propre affaire, cette terre est la nôtre et nous ne travaillons pas pour le compte de quelqu'un d'autre. Nous y mettons tout notre cœur et toute notre énergie.

Veronica tient un poulet et sourit.

J'ai de nombreux projets pour l'avenir: élever des poulets, réparer une pompe à eau et ouvrir un petit magasin pour ma fille.

© ILO/OIT Abdul Halik Azeez

Maintenant, j'envisage de réparer une pompe à eau, qui est la seule chose que je n'ai pas pour le moment. Et si notre situation s'améliore encore, j'aimerais élever des poulets comme moyen de subsistance. J'espère également créer un petit magasin pour ma fille cadette. Et c'est grâce à mon activité de culture d'arachides que je pourrai atteindre ces objectifs.

Note: Cette interview a été réalisée avant la crise économique actuelle au Sri Lanka.

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