Un emploi a changé ma vie de réfugié

Lorsque la guerre a éclaté en Syrie, nous avons été contraints de fuir le pays en raison du danger auquel nous étions confrontés. Le changement a été radical.

Nous vivions une vie de famille normale dans une maison et nous sommes devenus des réfugiés dans un camp, où notre maison n'était qu'une tente. Notre vie se résumait à attendre de recevoir de l'aide.

Au début, le camp n'était qu'un vaste ensemble de tentes dans le désert. Nous vivions à l'intérieur de ce qui était essentiellement un morceau de tissu. Nous étions exposés au vent et à la poussière, à des températures élevées en été et glaciales en hiver. Deux blizzards et deux tempêtes de vent ont frappé le camp alors que nous vivions encore dans des tentes. Aujourd'hui, nous vivons dans des conteneurs aménagés.

Mes quatre enfants sont nés dans le camp. En voyant une maison sur Internet, ils ont été surpris de voir qu'elle avait un escalier intérieur, car il n'y a rien de tel dans le camp.

Vivre dans un camp est en quelque sorte une vie primitive. Il n'y a ni électricité, ni transport, ni rues pavées. Du moins, c'était le cas au début.

L'eau était également un problème. Il était difficile de trouver de l'eau potable, de l'eau pour se laver et pour l'usage domestique.

Le fait de ne pas connaître les personnes qui vivaient autour de nous était également une source d'anxiété. Nous ne savions pas d'où venaient nos nouveaux voisins. Nous ne savions rien de leurs antécédents ou de leurs croyances. Cela nous inquiétait.

Un autre grand souci est que nous n'avions aucune source de revenus. Nous comptions sur l'aide qui nous était distribuée, mais cela ne suffisait pas.

En Syrie, j'étais enseignant dans des écoles primaires publiques avant et à la suite de l'obtention de mon diplôme universitaire. J'ai également enseigné l'histoire et la géographie dans des lycées locaux.

Cinq jours après mon arrivée dans le camp de réfugiés, j'ai commencé à chercher du travail, en m'adressant à différentes organisations et en recherchant des emplois en tant que bénévole. Le volontariat permet aux réfugiés de travailler à l'intérieur des camps, en effectuant des tâches qui seraient interdites aux Syriens en dehors de ceux-ci.

J'ai cherché une occupation dans tout le camp, en visitant toutes les organisations présentes, mais je n'ai reçu aucune réponse positive, ni aucune aide dans ma quête initiale de travail. Je suis donc sorti du camp et j'ai trouvé un emploi sur un chantier de construction à proximité. J'ai également travaillé dans l'agriculture.

Il m'arrivait de chercher du travail à l'intérieur du camp. Cela a parfois fonctionné. J'aidais les gens à transporter des objets lourds ou je réparais leurs tentes. J'avais besoin d'un peu plus d'argent pour surmonter les difficultés quotidiennes et ramener à la maison des produits de première nécessité, comme des matelas et des éponges.

Huit mois après mon arrivée dans le camp, j'ai finalement trouvé un poste de bénévole dans une organisation humanitaire. Ce fut la fin d'un voyage épuisant. Je n'en pouvais plus d'obtenir des emplois non qualifiés et précaires, comme les tâches quotidiennes que j'effectuais jusqu'alors.

Le volontariat consistait à apporter un soutien psychosocial aux enfants du camp, en particulier à ceux qui n'allaient pas à l'école et qui travaillaient à la place, en s'exposant à de nombreux risques.

Nous devions leur apprendre à se protéger. J'ai également donné des cours de lecture et d'écriture.

Ma vie a basculé à ce moment-là. Je suis redevenu une personne productive et confiante. Je pouvais enfin avoir un impact sur la vie des autres.

Grâce à ce poste, j'ai compris que le travail ne se résume pas à la seule rémunération qu'il génère. J'ai commencé à apprécier la valeur de mon travail grâce au changement que je créais en aidant les enfants vulnérables. Certains d'entre eux m'ont également pris comme modèle.

Je n'oublierai jamais certaines expériences vécues à cette période de ma vie. Il y avait par exemple des enfants de 14 et 15 ans qui travaillaient et savaient à peine lire ou écrire, mais qui ont appris à lire après avoir suivi mes cours.

Ce sont des moments touchants parce que j'ai pu les influencer et apporter un changement dans leur vie, aussi simple soit-il. Sans ces connaissances, leur vie serait plus difficile.

J'ai commencé ma collaboration avec l'Organisation internationale du Travail par un atelier de formation de trois jours sur les services d'orientation professionnelle. Par la suite, mes collègues et moi-même avons suivi des sessions supplémentaires sur l'orientation, proposées à l'intérieur du camp.

J'ai rejoint le projet en tant que bénévole.

J'étais intéressé par l'initiative du Club de recherche d'emploi de l'OIT parce que j'avais moi-même connu des difficultés pour trouver un travail à l'intérieur du camp. L'idée d'un club pour aider les gens à obtenir un emploi est un excellent moyen d'améliorer la situation sur le terrain. Je voulais aider d'autres personnes à enfin trouver un emploi décent. Pour moi, aider les gens en tant qu'animateur d'un Club de recherche d'emploi est une mission.

La recherche d'un emploi est une obsession pour les habitants du camp. Nous devons continuellement chercher du travail pour exister.

Il m'a fallu huit mois pour trouver mon premier emploi décent dans le camp. Mais si l'on évalue ses propres compétences et que l'on utilise une méthodologie spécifique pour chercher un travail, comme celle utilisée par le Club de recherche d'emploi, on peut gagner un temps précieux, et cela peut représenter un tournant dans la vie d'une personne.

Le Club contribue à éliminer le sentiment de frustration que les demandeurs d'emploi peuvent ressentir devant l'absence d'opportunités d'emploi et le fait qu'ils doivent se battre seuls pour développer leurs compétences.

Aujourd'hui, nous montrons aux membres du Club de recherche d'emploi comment trouver un travail, comment reconnaître leurs compétences, les atouts qu'ils doivent développer pour entrer sur le marché du travail, ainsi que comment fixer leurs objectifs pour obtenir l'emploi qu'ils souhaitent.

 Nous les aidons à faire les premiers pas dans leur recherche d'emploi, nous leur expliquons comment utiliser leur réseau de connaissances et comment en créer un nouveau pour obtenir un travail. Nous les aidons à rédiger leur CV, à le distribuer et à entrer en contact avec les gens.

Il existe deux types d'emploi pour les habitants du camp: les professions telles que l'ouverture et la gestion de magasins, l'entretien et la prestation de services, comme les forgerons et les charpentiers.

Le second type d'emplois est celui de bénévoles au sein d'organisations humanitaires: formation, enseignement, mise en œuvre d'activités et de programmes. Ces professions sont interdites aux Syriens vivant à l'extérieur du camp.

J'ai eu l'honneur de former des collègues du ministère jordanien de la jeunesse, qui aident les jeunes à entrer sur le marché du travail.

Aujourd'hui, lorsque je n'anime pas de sessions, je travaille avec une organisation humanitaire dans le camp en tant que bénévole et chef de bureau. Lorsque je rentre chez moi, je joue avec mes enfants et je rends visite à mes amis et à ma famille dans le camp.

Mon fils aîné, Hamza, a sept ans. Sidra a cinq ans, Zaid trois ans et Muhammad deux mois. Hamza va à l'école dans le camp. Si vous voulez poursuivre vos études après avoir terminé le lycée, vous devez obtenir une bourse, mais elle est très difficile à avoir.

Nous pensions pouvoir retourner en Syrie après une courte période dans le camp. Mais les jours se sont transformés en semaines, les semaines en mois et les mois en années.

Nous avons dû nous intégrer dans la nouvelle société et accepter la vie que nous menions, en coexistant avec les autres personnes du camp et en apprenant à nous développer dans notre nouvelle situation.

Ce pays est honorable, il est uni. Cela nous a aidés. La stabilité est notre principal rêve. La vie dans le camp n'est pas stable. Je souhaite une vie meilleure et un retour à la routine que je connaissais avant la guerre, et que mon esprit soit en paix.